Interculturalité et Coaching, deux postures , deux savoir-être essentiels

Interculturel et langue, interculturel et langage, interculturel et management, voilà, des notions que nous associons de plus en plus spontanément.

Quid du coaching et de l’interculturalité ?

Laurence Kam-Thong, coach professionnelle et experte en interculturalité nous explique en quoi la « posture du coach » nous ouvre à l’interculturalité.

L’interculturalité est avant tout un savoir-être, une forme d’intelligence relationnelle qui nous rend plus à l’écoute, moins centré sur nos croyances et nos prismes intérieurs conscients et inconscients.

On essaie vraiment de raisonner du point de vue de l’autre, d’entendre ses ressentis ( d’humiliation, de colère, de frustration ou de joie, d’appréciation) sans juger.

Cette manière d’être nous permet de vraiment nous connecter à l’autre, de le respecter en tant que sujet pensant et sensible.

Ceci est valable dans nos cultures familiales, de couple, mais aussi au travail entre cultures d’entreprises, métiers, de services, sectorielles et bien sûr entre régions et pays. Plus que jamais, l’interculturalité est une clé dans un monde où les entreprises fusionnent,  se mondialisent, les familles se recomposent .

Les cultures veulent aussi évoluer pour devenir plus inclusives, plus diverses. Comme le dit très justement Emilie Perrot, fondatrice française de Weinclusive, cabinet de conseil qui œuvre sur des projets d’inclusivité dans les organisations australiennes, «  Etre plus divers ne rime pas forcément avec être plus inclusif ». Encore faut-il savoir analyser les marqueurs de sa culture pour la faire grandir avec l’arrivée de ces nouveaux talents différents.

Comme Emilie Perrot l’explique, ce n’est pas tout de recruter plus de femmes pompières à Melbourne, encore faut-il savoir créer le climat propice pour les fidéliser.

L’interculturalité est un savoir-être qui se développe progressivement, par l’expérience, l’essai et l’erreur, mais aussi par un accompagnement extérieur régulier qui permet de s’observer et de se rendre compte de son ethnocentrisme. En effet, il est difficile de modifier quelque chose dont on n’a pas conscience. Ce type de savoir-être ne s’apprend guère online car il requiert une interactivité élevée sur-mesure, contrairement à ce que l’émergence du e learning laisserait à penser. ( même si le e-learning interculturel reste un auxiliaire intéressant).

Justement, le coaching professionnel aussi est interculturel ! Non-directif ,  il se base sur un questionnement dialectique neutre, sans jugement, ce requiert du coach, ouverture, curiosité et inclusivité.

 Au-delà de cette neutralité bienveillante, d’écoute active,  le coach doit se mettre dans le mode d’apprentissage de son client et non lui « amener» ses vues du monde, contrairement à un mentor, un formateur, un consultant qui partage et transmet des conseils et informations issus de son savoir, de son expérience , de sa compréhension du monde.

L’interculturalité et le coaching, même attitude : poser des questions ouvertes, s’informer sur ce que ressent l’autre, partager des perceptions objectives sans juger.

Prenons un exemple  concret récent, celui des BD brûlées par des tribus amérindiennes furieuses qu’on ait ainsi ridiculisé et humilié leurs semblables et leurs cultures dans des œuvres de divertissement. De notre prisme occidental, nous qui avons lu Tintin et Lucky Luke avec plaisir, nous savons que les auteurs ne cherchaient pas à ridiculiser les cultures amérindiennes. Cela nous semble une évidence. Nous sommes choqués par la destruction de livres, d’oeuvres d’art.

Dans les médias, des reporters et chroniqueurs français se sont aussitôt insurgés, en faisant un lien aussi rapide qu’ ethnocentrique avec les autodafés de l’Inquisition ou les Bouddhas détruits par les Talibans.  Notons que les Amérindiens ont parlé d’un rituel de transcendance par le feu, ce qui n’est pas forcément la même chose qu’un autodafé tel que vu par nos latitudes. J’insiste ici sur la notion de définition et de mot dans chaque culture.

De point de vue de l’interculturalité mise en pratique, nous devrions déjà nous interroger et interroger l’autre au lieu de juger, de plaquer ses propres mémoires, sa propre culture, en considérant que c’est la seule vérité, la seule manière de penser.

Notons que ce sont les mêmes qui s’exciteront sur la liberté de penser et la liberté d’expression. Laquelle, en fait ?

  1. Que ressent l’autre ?

Occupés à se gargariser de leur vérité, les journalistes pourraient aller enquêter sur l’humiliation ressentie par ces Amérindiens, d’où elle vient. On est si occupé à s’écouter juger autrui qu’on en oublie l’autre, cet objet destiné à reconfirmer nos croyances.

  • Avons-nous assez d’informations pour évaluer, pour juger de la situation ?

Que savons-nous de ces cultures lointaines ? Que savons-nous de l’intention et les motivations précises de ces personnes ? Presque rien, mais nous allons porter un jugement à partir de nos propres croyances et en buvant sans questionner ce qu’on a lu de médias de nos propres cultures. C’est exactement ce qui s’appelle l’ethnocentrisme.

Les politiciens canadiens en poste ( gouverneur et premier ministre)   ont commenté de façon prudente, comprenant le sentiment des Amérindiens ontariens concernés et désapprouvant à titre personnel et institutionnel. Les mêmes reporters français ont bien sûr vu en cela une abdication au wokisme alors qu’en fait c’est une démarche plutôt interculturelle. On peut  ne pas être d’accord mais comprendre et entendre la douleur et la colère d’autrui. (L’acte n’était pas illégal en soi, donc, les autorités n’avaient qu’un avis « moral ».  )

Si l’on persiste dans le déni du ressenti d’autrui,  au lieu de s’écouter, d’échanger, d’essayer de comprendre, on s’invective et on adopte des conduites exacerbées, stériles, qui ne font qu’attiser la violence. …dans un dialogue de sourds où chacun , au lieu de partager sa douleur et sa frustration, fait la guerre à une image tronquée de l’autre….et même prépare sa vengeance.

L’interculturalité passe par 3 actes essentiels de communication qu’on retrouve aussi en  CNV ( Communication Non Violente) et en situation de coaching.

  • Demander, se renseigner de façon aussi neutre que possible
  • Ecouter, accuser réception du ressenti de l’autre, on n’est pas forcément d’accord, mais on peut reconnaitre que l’autre est irrité, blessé, etc. On a besoin de comprendre ce que l’autre veut, craint, sa manière de fonctionner.
  • Expliquer, partager son ressenti à son tour sans accuser l’autre, en partant de son émotion.

Sans cette démarche, aucune connaissance de l’autre, aucun lien  relationnel n’est possible.  C’est la même chose dans notre relationnel avec tous les êtres , humains, animaux, la Nature.

Bien sûr, cela requiert d’apprendre, de s’entraîner, de pratiquer dans sa vie perso et pro. C’est loin d’être simple, quand on est confronté aux douleurs et pressions de la vie quotidienne. Nos cultures familiales, scolaires, nos expériences pro et perso plus ou moins réussies, parfois traumatisantes nous apprennent à réprimer nos ressentis, à les craindre, à les ignorer, à recourir à des expédients.

C’est pourquoi une bonne formation de coaching dure plusieurs mois sous la houlette d’un mentor, car acquérir cette posture ne se fait pas uniquement en apprenant à manier des techniques ou en suivant un cours théorique, aussi prestigieux que soit le prof ou l’école. Un savoir-être s’acquiert rarement instantanément.

C’est une vraie démarche de développement personnel, d’observation de soi, de remise en question, que le coaching requiert pour apprendre à écouter vraiment l’autre, sans juger, en étant dans le chemin que l’autre creuse, à son rythme, selon ses raisonnements et préférences. Le coach écoute et par son non-jugement rassure, manifeste un vrai respect implicite mais palpable. C’est souvent une sensation nouvelle pour le coaché, qui se sent soudain incroyablement libre. Plus libre même qu’en thérapie où il sent que le psy est certes en train d’écouter avec bienveillance, mais aussi de diagnostiquer, d’analyser.

NB- Toutes les formes de soutien ( formation, thérapie, soin, conseil, mentoring, coaching, médiation, management, audit)  sont toutes valables et utiles. Le choix/ panachage de telle ou telle démarche  dépend des contextes, des besoins de chacun. Il ne s’agit pas de faire le procès d’un métier ou d’un autre. D’ailleurs, il est courant que des praticiens se forment à diverses approches pour enrichir leur pratique. On ne peut que s’en réjouir.

L’interculturalité, c’est l’ouverture à la diversité des êtres, à écouter les ressentis des autres, à se mettre à la place des autres, à découvrir leurs croyances et valeurs. Plus vous aurez l’attitude d’un coach non directif, plus vous arrêterez de juger, d’interpréter selon vos prismes, vos conditionnements, vos croyances. Vous arrêterez de tronquer l’autre via vos visions personnelles, votre logiciel. Vous prendrez petit à petit conscience de votre propre logiciel interne et de ses limites, souvent à votre détriment personnel ( critique interne…)

Vous l’avez compris, plus vous êtes ouvert, plus vous comprenez les autres, et plus vous vous comprenez vous-même !  

C’est pourquoi l’émergence du coaching en entreprise, via des coach externes et internes, via des managers formés au coaching est une très bonne chose , car elle peut réellement favoriser et prolonger le travail effectué par des formateurs-consultants-coachs spécialisés en management interculturel et en interculturalité.

Heureusement, nombre de managers sont formés en reconnaissance au travail, à la communication positive non violente, à l’interculturalité, au management interculturel, au coaching, mais ils ne font pas forcément le lien entre toutes ces compétences. Bien sûr, nombre de managers et de collaborateurs, dotés d’un attachement sécure et d’une bonne confiance en eux, ont des attitudes empathiques et attentives sans attendre d’être formés.

Mais parfaire la formation dans le développement de ces compétences soeurs ne peut que favoriser une meilleure performance individuelle et collective et un meilleur bien-être dans son travail et sa carrière.

Vous voyez alors le monde dans sa richesse et vous apprenez à considérer que la différence est aussi une chance. Vous jugez moins…à commencer par vous-même, vous profitez plus de la vie.

Tous droits réservés, Innoveria Coaching. 2021.

Bi culturelle franco-chinoise, cadre en entreprise pendant 20 ans, expatriée pendant 8 ans, parlant 6 langues,  Laurence Kam-Thong a la joie d’exercer comme coach, mentor, formatrice et consultante auprès d’entreprises, de professionnels et de particuliers, les accompagnant dans leurs projets de développement et de changement (culture, carrière, efficacité professionnelle, etc).

Elle a eu le privilège de se former au savoir-être et à l’art du coaching professionnel non directif auprès d’une des meilleures coaches du monde hispanophone,  Beatriz Garcia Ricondo ( MCC) , et de Vladimir Livshits ( PCC), au sein de l’école Crearte Coaching. Laurence s’est également formée au coaching systémique avec Chantal Motto ainsi qu’en constellations familiales avec Constanz Lang. Laurence intervient principalement en français, anglais et espagnol ( castillan) .

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